Le début de la Genèse raconte le passage d’un chaos (un « tohu-bohu » dit le texte hébreu) à un cosmos. Dieu transforme une masse inerte, ténébreuse et marécageuse, où tout est confus et indistinct, en un monde ordonné et organisé où chaque chose et chaque être ont leur place, ce qui rend possible la vie. La Bible raconte aussi qu’en des moments de « décréation » (le déluge, la captivité de Babylone, etc.), le chaos envahit, dérègle ou détruit le cosmos dans des processus mortifères.
Vivons-nous aujourd’hui une offensive du chaos ou seulement un épisode particulièrement spectaculaire de la rivalité ordinaire des pouvoirs du cosmos ? Les informations donnent le sentiment d’un monde qui se déglingue, où les affrontements s’amplifient et le désordre s’installe faute d’une instance arbitrale reconnue. Mais dans ma ville, tout semble aller normalement (sauf que faire le plein m’a pris une demi-heure au lieu des cinq minutes habituelles).
Je ne sais comment évaluer la situation, mais j’ai une conviction. L’évangile nous dit que le Royaume (un monde heureux) s’approche quand on accepte de mourir à soi-même et de ressusciter à une vie nouvelle. De même, pour que notre société soit un peu plus cosmos et un peu moins chaos, il importe que chacun oublie un peu son ego et cherche la conciliation ou la réconciliation pour construire quelque chose ensemble plutôt que de se détruire mutuellement. En langage religieux on appelle à une conversion ; en termes laïcs on invite à se montrer raisonnable.