L’humilité est une vertu généreuse par son refus des mérites, des vaines prétentions, de l’orgueil déplacé, par un sens de l’abnégation, le refus de parader. Marie dit de Dieu qu’il a élevé les humbles et les a ainsi placés au premier rang (Lc 1,52). Avec Jésus, les « petits », les victimes de l’injustice et des regards méprisants, les modestes, sont redressés et mis à leur juste place.
L’humilité, c’est aussi savoir admirer, non pas uniquement des génies, mais des personnes proches de nous. Il y a tant de gens dignes d’admiration et parfaitement inconnus ! C’est si heureux et exaltant de pouvoir les admirer simplement.
Si nous connaissons la fausse humilité des tartuffes et des hypocrites, il y a une fausse humilité moins évidente. Je pense à certaines formes d’obéissance religieuse, de soumission aux supérieurs. « La conception servile de l’humilité est une déformation du christianisme et de la voie spirituelle », écrit N. Berdiaeff (1874-1948). La révolte nous arrache aux prétendues humilités ; elle peut être salutaire, évangélique.
Mais la pire humilité est peut-être celle du dénigrement de soi où se cachent beaucoup d’égocentrisme et d’orgueil. Égocentrisme, parce que le sentiment perpétuel de nos péchés est une attitude nombriliste. Orgueil, par un désir démesuré de perfection. Il peut y avoir aussi et secrètement une autosatisfaction malsaine et morbide dans l’abaissement et l’ascèse, comme si Dieu exigeait avant tout de nous souffrances et sacrifices.
Enfin, dire « à Dieu seul la gloire » peut correspondre à une passivité stérile et signifier une négation de l’être humain dans sa dignité, le rejet d’une vie et d’une liberté créatrices, des audaces inventives et transfiguratrices que Dieu attend de nous.