Venez comme vous êtes !
Nous ne sommes pas les seuls à utiliser ce slogan, et c’est une éthique de conviction qui nous tient à cœur et qui identifie notre Église.
Nous aimerions dans l’idéal vivre de cette attitude en accueillant l’autre dans sa singularité, mais regardons d’un peu plus près nos réalités.
Nous sommes des êtres de relations, mais nous sommes habités par la peur de l’inconnu qui nous déstabilise. Cette peur, qui fait partie de notre réel, nous conduit à avoir des attitudes d’accueil de l’autre en le limitant à des codes définis. Attitude qui chercherait à placer l’autre dans des cases (la famille, le travail, le statut social, les connaissances protestantes) ; attitude qui essaierait, sans vraiment connaitre la personne, à lui chercher une place dans l’espace, le fonctionnement de l’église locale pour la faire survivre ; attitude qui ciblerait les jeunes, en leur mettant une pression, celle du poids de l’avenir de notre Église sur leurs épaules.
Tant de questions posées, de paroles échangées, avant même de laisser simplement, avec nos silences, la place à l’autre. Alors qu’il faudrait être simplement là, dans une attitude d’accueil et de bienvenue.
Savons-nous simplement accueillir l’autre tel qu’il est, l’inviter à venir comme il est, sans y rajouter de notre soit-disant valeur ajoutée ?
Voilà un exercice bien difficile à faire si nous voulons être honnêtes avec nous-mêmes.
La peur de voir disparaître nos Églises telles qu’elles sont peut effectivement condamner l’autre à se limiter à l’apprentissage et à la conformité de nos codes, en oubliant la rencontre qui l’amène sur un terrain inconnu et non maîtrisable, mais qui constitue nos Églises.
Là où les deux personnes se mettent en mouvement
Nous constatons la réalité du manque d’une génération, voire de deux, dans un grand nombre d’Églises locales. La présence des jeunes se fait rare ainsi que celle de leurs parents qui n’ont pas un grand intérêt pour l’Église et son message, contrairement à ce qui était encore vrai il y a quelques décennies.
C’est un constat qui démoralise certains membres de nos Églises, saisis par la crainte de la disparition de leur Église et de leur foi.
Alors, la catéchèse reste toujours ce qui semble nécessaire, mais aux vues de la réalité, est-elle vouée à s’éteindre avec cette peur qui paralyse ?
Notre foi est-elle obsolète dans ce monde contemporain sécularisé ?
Bien sûr que non !
La peur a sa place, elle peut être entendue et accueillie, mais elle ne doit pas prendre la première place et nous guider !
Regarder en arrière nous transformerait en « statue de sel ».
L’Évangile doit être ancré dans notre réalité, où il nous précède et où il nous appelle. Il ne demande qu’à être transmis encore et encore dans un monde constamment en mouvement.
Dans la rencontre, il y a un double mouvement. Nous avons peut-être nous-mêmes à bouger, à changer, à nous mettre en question.
Résonance avec les valeurs
Étymologiquement, le terme « catéchèse » vient du grec « Katekein » qui signifie faire écho, faire résonner.
La catéchèse, comme nous la connaissons bien dans l’histoire de nos Églises locales, est en difficulté aujourd’hui, et ce n’est pas nouveau, elle ne résonne plus comme dans le passé, les codes ont changé.
Proposer aujourd’hui une catéchèse classique partant de la Bible est peu attractif dans notre monde sécularisé, qui rejette de plus en plus la religion et son histoire.
Et pourtant… Les jeunes sont bien là, dans notre monde, en quête de sens, de devenir et d’identité. Il y a des appels, mais qui restent sans réponse.
Notre instruction religieuse n’a pas vocation à transmettre des rites, des habitudes, des certitudes, des histoires de guerres de religion. Sa vocation est de transmettre une « bonne nouvelle », une Espérance qui prend son origine hors de notre monde, qui a traversé toutes les souffrances que rencontre notre humanité et qui les a vaincues. Elle transmet une confiance, une foi en la vie authentique. Elle peut résonner avec ce que vit tout individu dans son histoire personnelle.
Nous avons à être là où nos contemporains sont, à sortir de notre confort, de ce que nous connaissons, de ce qui nous rassure.
En fait, nous ne sommes plus réellement sur les lieux où se situent les interrogations de nos contemporains.
« Où es-tu ? » Voici la première interrogation que Dieu pose à Adam dans le livre de la Genèse.
Nous devons modifier notre catéchèse classique pour aller à la rencontre de l’autre, là où il se situe, en changeant notre invitation pour garder notre attitude d’accueil inconditionnel de l’autre !
Et pour cela, nous ouvrir à
« une éducation populaire ouverte à tous dans le respect de chacun·e » pourrait être une solution.
Il s’agit de rencontrer et d’accueillir les jeunes au prisme des fruits de l’Évangile : nous avons un témoignage biblique sur la construction du « vivre ensemble » dans l’égalité, sur l’enseignement de la liberté de conscience, sur l’engagement, sur le souci de l’autre, sur l’écoute, l’espérance, la solidarité…
Que les jeunes puissent être accueillis tels qu’ils sont et pour ce qu’ils sont, dans un espace cadré offrant des temps de partage, de découvertes, de rencontres, d’écoute, de silence, dans l’apprentissage des valeurs qui fondent le vivre ensemble.
Chaque enfant
est un adulte en devenir
Cette catéchèse d’éducation populaire n’offre peut-être plus un itinéraire classique de connaissances bibliques, mais elle devient un itinéraire basé sur les attitudes à adopter, les rencontres, les témoignages d’engagement et de foi, de questionnements. Et la Bible est prise comme ressource et non comme entrée.
Enseigner les fondamentaux qui structurent la vie et la foi :
l’amour, le don, la liberté, le soin, l’entraide, l’engagement, la confiance, la vie authentique…
Faire un pas de côté pour être auprès des jeunes dans leur cheminement est une vocation de nos Églises. Allez vers, à la rencontre, écouter, éveiller, témoigner et cheminer pour que leur parole puisse se construire et être valorisée.
Transmettre la Bible comme ressource, susciter un intérêt pour l’Espérance de ce dieu biblique venu à notre rencontre, discerner une inspiration qui nous dépasse et qui nous appelle, voilà le but de la catéchèse !
Cette parole du dieu biblique qui dé-coïncide avec les réponses de notre monde et où l’Espérance n’est entravée par aucune réponse simpliste.
Notre témoignage donne du sens à la vie et permet aux jeunes de partir enquêter sur eux-mêmes, d’adopter une attitude réfléchie et engagée avec une altérité qui les dépasse, mais qui ne fait pas peur.
De nouveaux liens et un nouveau regard peuvent être mis en lumière afin de prendre confiance en soi, confiance en l’autre et confiance dans le monde.
Enseigner l’humanité
L’amour humain, c’est un mystère, comme celui qui lie Dieu à l’humanité. Aimer, c’est la seule vraie force de l’homme et de la femme, quels qu’ils soient » nous dit la philosophe Simone Weil.
Pour enseigner l’Évangile, il faut partir de l’humanité, enseigner l’humanité par nos expériences et par les valeurs que nous rencontrons et qui s’éclairent ou s’illustrent dans les textes bibliques.
L’Évangile transcende les valeurs, mais c’est en partant d’elles qu’on peut faire résonner la Bonne Nouvelle.