Plateforme du protestantisme de liberté et de progrès

Témoignage: Toutes les églises ne sont pas sombres et froides

Partager cet article :
Cathedral
Image par Henning Westerkamp de Pixabay

Il y a deux ans à peine, ma vision du christianisme se résumait à quelques souvenirs d’enfance, un peu d’histoire que l’école m’avait enseignée, et tout ce que je pouvais en entendre et en lire dans les médias généralistes.
Entre la fâcheuse tendance des journalistes à passer le micro aux personnes les plus clivantes et virulentes, et le fait qu’une trentaine d’années sont capables de transformer dans la mémoire une petite église de village en repère sombre et froid où rebondissent les condamnations aux enfers, je maintenais avec la foi une distance de sécurité. C’était au mieux un conte de fées avec son lot de malédictions dont il était certain que j’écoperai, au pire un véritable danger condamnant bien des aspects de ma vie. Et puis moi, je suis curieuse, j’ai toujours plein de questions, et les questions « ça ne se faisait pas », alors c’était sûr et certain : Dieu et moi, ça ne « matcherait » jamais.
On devrait toujours se méfier de nos certitudes…
Une rencontre a bouleversé ma vie et tout ce que je croyais savoir.
Cet homme mis sur ma route par le hasard m’a fait écouter une interview d’un pasteur libéral. À travers les paroles de ce pasteur, j’ai découvert une autre conception de Dieu, une foi chrétienne ouverte qui n’était pas bâtie sur un socle de culpabilisation et de dogmes comme autant de chaînes, mais qui traçait la voie d’une incroyable libération, celle d’une miséricorde offerte sans condition, d’une grâce nous élevant pour imaginer plus fort, rêver plus fort, aimer plus fort. Chacune de ses interventions mettait des mots sur ce qui bruissait en moi depuis toujours.
Encore aujourd’hui, je serais incapable de décrire avec une absolue exactitude l’ébranle- ment qui fut le mien à ce moment. Il m’est, je crois, impossible d’être plus précise que ça : je ne l’ai pas écouté, je l’ai entendu, alors, hésitante, j’ai abordé de la pointe du pied l’écume de la foi. Et contre toute attente, contre tous mes préjugés passés, je ne me suis pas noyée dans la tourbe menaçante des « fais ceci, ne fais pas ça, rachète-toi, gagne ton ciel, tu n’as que ce que tu mérites ! ». Bien au contraire, de cultes en lectures, de discussions en engagements, je suis née à moi-même. J’ai appris avec ravissement que j’avais le droit de lire les Écritures, de penser avec elles et même contre elles, de me nourrir de livres pour bâtir ma propre théologie, de rire pendant une prédication, et de poser des questions, des centaines de questions…

Depuis ce premier culte au- quel j’ai assisté, ce moment où j’ai ressenti avec une absolue certitude que Dieu demeurait en moi, je vis cette promesse qui a traversé les siècles, celle d’un appel, d’une présence dans chaque acte de grâce, chaque geste de tendresse, chaque main tendue, chaque miette d’espérance, dans ce pari sur l’avenir que je fais sans aucune garantie, mais avec une confiance nouvelle, incandescente. Parce que j’ai trouvé dans la Bible tout autre chose que les vociférations violentes et les accusations terribles dont j’avais maintes fois été témoin dans le passé : j’y ai découvert la sublime poésie d’un Dieu d’amour.
J’ai peu à peu appréhendé une autre manière de vivre la foi qui m’a cueillie : ni tonnerre, ni tempête, mais un souffle doux et subtil qui m’accompagne depuis lors, un chemin faisant la part belle aux interrogations, n’écartant pas la raison des Écritures, et me laissant chaque jour au cœur, non ce sentiment d’être illégitime et malvenue que j’ai longtemps éprouvé à l’évocation du christianisme, mais la sensation d’être à ma place, d’être aimée, et d’avoir reçu le cadeau extraordinaire de l’Évangile.
Un cadeau que je n’en finirai jamais de déballer, raison pour laquelle sans doute j’entre- prends des études de théologie protestante dès la rentrée : c’est qu’il me reste encore tant de questions, et encore tant d’envies !
Un cadeau que j’ai envie de transmettre aussi.
D’offrir à quelqu’un pour qui les petites églises de village sont encore sombres et froides

Image de Gaëlle Lecompte
Gaëlle Lecompte
Professeure, autrice, étudiante en théologie protestante à l'Université de Strasbourg, et prédicatrice laïque à l'Eglise Protestante Unie de Clermont Auvergne depuis peu.
Partager cet article :

Vous venez de lire librement un article de librecroyant-e.com. Nous avons choisi l’ouverture à tous et la gratuité totale, mais ce site à un coût et il ne peut se financer que par votre don. Chaque euro contribuera au partage de ces lectures.

Vous pouvez également nous suivre sur les réseaux sociaux, via les icônes ci-dessous

S'abonner à la newsletter