Plateforme du protestantisme de liberté et de progrès

Un roman pour comprendre la troisième Rome

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Vladimir Volkoff, L’hôte du pape, Monaco, éditions du Rocher, 2004, 334 pages.

  Lorsque je l’avais rencontré peu après la parution de ses deux grands romans Le retournement (1979) et Le montage (1981), Vladimir Volkoff (mort en 2005) m’avait expliqué que, pour lui, l’espion ou l’agent double étaient les personnages les mieux à même de donner à réfléchir à un chrétien sur sa situation dans le monde contemporain.

  Avec L’hôte du pape (2004), Volkoff a imaginé le cas d’un jeune général de l’Armée rouge qui, à la suite d’un incident de guerre, devient moine orthodoxe, mais se voit incité par le patriarche de Moscou et de toutes les Russies à assumer un ministère paroissial, pour être ensuite intronisé métropolite de Léningrad, mais à condition d’endosser simultanément la situation de colonel du KGB.

  Ce roman est l’un des livres les plus aptes à faire comprendre en termes clairs tout ce que peuvent représenter pour un chrétien orthodoxe d’obédience russe « Moscou, la troisième Rome » ou la conviction que « le salut viendra de la Sainte Russie ». Le thème du livre est également l’occasion de faire astucieusement ressortir la différence, pour ne pas dire l’opposition séculaire, entre le catholicisme romain et l’orthodoxie russe. Et puis surtout, Volkoff oblige son lecteur à considérer d’un regard neuf la situation ambiguë, mais généralement très mal comprise et encore moins bien acceptée en Occident, de ces dignitaires ou émissaires orthodoxes russes dont chacun savait, du temps de l’URSS, qu’ils avaient secrètement partie liée avec le KGB.

  Or il y a plus : ce roman s’avère d’une brûlante actualité pour mieux démêler le curieux écheveau, du moins à nos yeux, des relations entre l’actuel gouvernement russe et le patriarcat de Moscou. Ne serait-ce que pour ce gain de compréhension, ce roman vaut de retenir l’attention, même si le lecteur protestant sera un peu surpris du dédain avec lequel on y fait quelques rares allusions à sa confession.

Image de Bernard Reymond
Bernard Reymond
né à Lausanne, a été pasteur à Paris (Oratoire), puis dans le canton de Vaud. Professeur honoraire (émérite) depuis 1998, il est particulièrement intéressé par la relation entre les arts et la religion.
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